Wednesday, October 16, 2024
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La métaphore de Suez

Egypte-néo-islamiste: Retour sur la séquence Mohamad Morsi et des néo islamistes arabes à l’ombre du «printemps arabe» I – La…

Par : René Naba - dans : Analyse Egypte - le 4 juillet 2013

Egypte-néo-islamiste: Retour sur la séquence Mohamad Morsi et des néo islamistes arabes à l’ombre du «printemps arabe»

I – La signification symbolique de la destitution de la statue de Nasser

Paris – La destruction de la statue de Nasser à Benghazi, acte fondateur du pouvoir néo islamiste en Libye, en 2012, a constitué la marque symptomatique du nanisme politique d’une équipe sans légitimité, ni charisme, parvenue au pouvoir à Tripoli sous les ailerons des Tomahawks américains. Indice d’une rare aberration mentale, la destitution symbolique du chef de file du nationalisme arabe a traduit dans le même temps la haine rance que les néo islamistes nourrissent à l’égard d’un homme qui a relevé la tête des Arabes et tenu en respect les puissances occidentales pendant près de deux décennies.

Nasser qui a scandé le redressement arabe avec son légendaire cri de ralliement « ارفع رأسك يا أخي» Irfah Ra’sak Ya Akhi- Relève ta tête mon frère», dont le charisme enflammait les foules de la planète bariolée au point de faire peser une menace d’implosion du Commonwealth britannique dans la foulée de l’expédition de Suez.

Nasser, l’homme de la fermeture du Canal de Suez, en 1956, qui défiera le droit maritime international pour couper le ravitaillement énergétique de l’Occident coupable d’alignement pro israélien. Nasser passé à la postérité pour avoir été l’homme du haut barrage d’Assouan, qu’il construira avec l’aide soviétique, bravant les foudres américaines pour nourrir son peuple. Nasser, le partenaire de la guerre d’indépendance de l’Algérie, qui assumera sans broncher les conséquences de son soutien à la révolution algérienne: une agression tripartite des puissances coloniales de l’époque (France, Grande Bretagne) et de leur poulain Israël lors de l’expédition punitive de Suez en novembre 1956. Nasser, enfin, dont les interlocuteurs étaient des figures de légende: Chou En lai (Chine), Ho Chi Minh (Vietnam), Nehru (Inde), Josep Broz Tito (Yougoslavie), Ahmad Soekarno (Indonésie), Charles De Gaulle, avec lequel il a procédé à la réconciliation franco-arabe à la suite de la rupture de Suez. Coutumiers du fait, les Frères Musulmans se tromperont ainsi constamment de cible et de trajectoire, sacrifiant l’essentiel à l’accessoire, au point d’apparaitre, sous une hostilité apparente, comme le cheval de Troie de l’Occident, la roue dentée de la stratégie atlantiste en terre arabe (1).

Nasser avait les yeux rivés sur Tel Aviv, les Frères Musulmans sur La Mecque, la City et Wall Street. L’officier nationaliste percevait Israël comme la principale menace sur le Monde arabe et privilégiait la solidarité pan arabe, alors que les Frères Musulmans prônaient la solidarité religieuse comme antidote à la laïcité, occultant le fait israélien. La confrérie, première formation à avoir mené le combat contre le colonialisme britannique en Egypte, s’est ainsi ralliée aux pires ennemis de son pays: l’Arabie saoudite, vassal des ennemis de son pays, les Etats Unis et la Grande Bretagne, en une  tragique déviation de trajectoire.

II- Gaza, le baromètre du régime néo islamiste égyptien et la Palestine le test de son indépendance

Au pouvoir, les Frères Musulmans se sont appliqués à imposer d’autorité leur crédo sans considération du nouvel environnement régional et de la réalité des forces internes. Sans prendre en compte les profondes aspirations d’un peuple frondeur et tombeur de la dictature et les impératifs de puissance que commande la restauration de la position de l’Egypte dans le Monde arabe.

Sur fond de concurrence avec la mouvance rivale salafiste et d’opposition frontale avec le camp laïc, l’épreuve de force s’est révélée infiniment plus redoutable que cinquante ans d’opposition déclamatoire souvent à connotation sinon démagogique à tout le moins populiste. Au terme d’un an de pouvoir ponctué de violents heurts avec la frange contestataire de la population, le verdict est tombé sans appel. Les Frères musulmans ont «renié leurs engagements», tranchera Amira Howeidy, le 3 avril, 2013, Rédactrice en chef adjointe du Al-Ahram Weekly, mettant en avant le comportement de l’Egypte néo islamiste face à Gaza.

Fait sans pareil dans les annales diplomatiques internationales, l’Egypte continue d’appliquer un accord périmé auquel elle n’a pas souscrit. Signé entre Israël, l’Union Européenne et l’autorité palestinienne en 2005-2006 pour la circulation des biens et des personnes cet accord a été piétiné par deux opérations militaires israéliennes de grande envergure, le premier «Plomb durci» en 2007-2008, le second en novembre 2011, après la visite de l’Emir de Qatar à Gaza et le ralliement du Hamas au groupe des pays anti syriens. Un accord d’autant plus périmé qu’il s’est accompagné de l’arrestation du tiers du parlement palestinien, particulièrement des députés de la branche palestinienne de la confrérie sans la moindre protestation du Caire ni des autres régimes néo-islamistes arabes (Tunisie, Libye), indice du surréalisme du nouveau pouvoir égyptien et de la perte de souveraineté de l’Egypte et de ses autres confrères.

Seul acteur transnational de l’aire musulmane depuis l’effondrement du bloc soviétique, la confrérie se pose en équivalent de la «démocratie chrétienne» en Europe occidentale, Un parti politique à soubassement religieux. Fer de lance de l’Arabie, elle a mène un combat sans relâche contre Gamal Abdel Nasser, chef charismatique des Arabes auréolé d’une authentique légitimité populaire, cible d’une offensive occidentale sans précédent dans le Monde arabe. A des moments charnière de la confrontation israélo-arabe, elle cherchera à déstabiliser la Syrie, l’autre pays du champ de bataille, la première fois en 1966, au moment du détournement des eaux du Jourdain, la deuxième fois, en 1982, avec la révolte de Hama, à quatre mois de l’invasion israélienne du Liban en vue d’y propulser le chef phalangiste Bachir Gemayel à la magistrature suprême libanaise. La levée de l’ostracisme qui la frappait jusqu’à présent serait destinée à s’assurer sa coopération dans la stratégie américaine et à compenser quelque peu l’impéritie des Etats-Unis dans la zone, du fait de son impuissance face à Israël en ce qui concerne le gel de la colonisation et la relance des négociations israélo-palestiniennes.

Le partenariat que cherche à promouvoir les Etats-Unis avec les Frères Musulmans ne résulte pas d’un amour immodéré pour les Musulmans, mais vise à livrer une compensation au rabais des turpitudes antérieures à leur égard, notamment en ce qui concerne la question palestinienne. A assurer la pérennité de l’économie du marché dans les pays arabes, qu’ils jugent plus assurée par les régimes islamiques que par un système nationaliste contestataire avec son cortège de syndicats et de revendications professionnelles et patriotiques. Un quitus en somme à son combat contre les chefs de file du nationalisme arabe anti américain.

L’accession de Mohamad Morsi à la magistrature suprême a considérablement modifié la donne plaçant la confrérie en situation paradoxale vis à vis de l’Arabie saoudite, son incubateur et propulseur en direction de l’Islam européen.  Premier dirigeant islamiste démocratiquement élu dans le plus grand pays arabe, Morsi est en mesure de contester le leadership de la dynastie wahhabite tant au niveau religieux via l’Université Al Azhar, qu’au niveau politique. En concurrence sur les deux champs de son intervention, religieux et politique. En phase de convalescence égyptienne et de douloureuses successions saoudiennes, la compétition est vive entre les divers prétendants. Tison américain planté sur le flanc de l’Arabie et nouveau soutien financier des Frères Musulmans en remplacement du Royaume, le Qatar du même rite wahhabite rêve de se substituer à la dynastie saoudienne au leadership spirituel et politique du Monde arabe sunnite.

Il en est de même de la Turquie, principale bénéficiaire de la destruction de l’Irak et de la Syrie, qui se positionne comme nouveau chef de file du Monde sunnite tout court. Dans un spectaculaire retournement d’alliance, les anciens alliés de la dynastie se posent désormais en postulants à la succession. Le contentieux entre l’Arabie saoudite et les Frères culmina à la fin des années 1990, lorsque la confrérie a damné le pion à l’Arabie au niveau de l’islam européen et que le Hamas, sa branche palestinienne, a rallié l’«axe chiite» constitué par l’Iran, la Syrie et le Hezbollah. Emboitant le pas à l’Arabie, les autres pétromonarchies, notamment les Emirats arabes Unis et le Koweït maintiennent sous pression les sympathisants de la confrérie sur leur territoire de crainte d’un débordement. Il en est de même de la Jordanie qui redoute de faire les frais d’une opération de déstabilisation résultant d’une effervescence islamiste à l’effet de faire du royaume hachémite la «patrie de substitution» aux Palestiniens.

III- Al Qaida, un double défi à l’Arabie saoudite et à l’Egypte

Sur fond de vaste recomposition du paysage politique régional, de vive compétition entre l’Arabie saoudite, l’Egypte et le Qatar pour le leadership arabe, en phase éruptive du Monde arabe, Al Qaida s’est replacé dans le jeu depuis la terre des ancêtres de son fondateur, Oussama Ben Laden, le Yémen, adressant un magistral pied de nez à ses anciens parrains.

S’implantant, une décennie après l’apocalyptique raid qu’il a commandité sur les symboles de l’hyper puissance américaine, sur le flanc sud du royaume saoudien dans un combat retourné contre la dynastie wahhabite visant au premier chef à rétablir la légitimité de son chef posthume et à redorer son blason au sein du Monde arabe sur les lieux mêmes de son immersion, la mer d’Oman, the Arabian Sea. Houspillé pour sa fugitive disparition à la suite de l’invasion américaine de l’Afghanistan, en novembre 2001, à bord d’une moto conduite par son borgne compère, le Mollah Omar, chef des Talibans, le sous-traitant émérite de la connivence saoudo américaine dans la guerre antisoviétique d’Afghanistan (1980-1989) s’est rappelé au bon souvenir de ses anciens bailleurs en faisant un retour signalé au Yémen, à tout le moins ses disciples, se replaçant en Arabie méridionale, à l’épicentre de la connexion arachnéenne du dispositif militaire et énergétique américain, en bordure de la veine jugulaire du système énergétique mondial, à l’intersection des voies des communications maritimes internationales.

La «guerre oubliée du Yémen» n’est pas si oubliée que cela, en tout cas pas par tout le monde à en juger par ses multiples protagonistes et l’imposant dispositif militaire déployé à sa périphérie. Ce pays qui fut le champ d’affrontement égypto saoudien dans la décennie 1960 pourrait redevenir, par tribus interposées, le terrain de confrontation des nouvelles puissances régionales, l’Iran, d’une part, l’Arabie saoudite soutenue par les Etats-Unis d’autre part. Le repositionnement d’Al Qaida a été opéré dans cette optique-là. Situé à la pointe sud-ouest de la péninsule arabique, frontalier de l’Arabie saoudite au Nord, et du Sultanat d’Oman, à l’Est, le Yémen possède une façade maritime d’une longueur de 1 906 km de côtes, faisant la jonction entre la Méditerranée et l’Océan indien via le canal de Suez et le Golfe arabo-persique.

Jamais colonisé, ce pays, placé selon son étymologie à droite sur le chemin du pèlerinage de la Mecque, couvre une surface de 527 970 km², soit presque autant que la France. Via ses trois îles, -Kamran, Perrin, et Socotra- il commande l’accès à la mer Rouge par le détroit de Bab el-Mandeb, et l’île de Socotra (la plus grande des îles) dans l’océan Indien.  Signe de l’importance stratégique de la zone, le Royaume Uni, du temps du protectorat britannique sur l’Arabie du sud, avait fait du port d’Aden, la grande ville du sud Yémen, la place forte de la présence britannique à l’Est de Suez pour la sécurisation de la route des Indes.

L’implication d’Al Qaida dans le conflit inter yéménite et son environnement somalien a retenti comme un camouflet à ses anciens partenaires, l’Arabie saoudite et les Etats-Unis, en même temps qu’elle souligne la dérision de la stratégie américaine dans son objectif majeur, «la guerre mondiale contre le terrorisme», la mère de toutes les batailles.

Sur fond d‘épreuves de force américano-iranien à l’arrière-plan du contentieux nucléaire iranien, Oussama Ben Laden, yéménite d’origine, saoudien de nationalité déchue, avait choisi de livrer bataille sur la terre de ses ancêtres.  De porter, dans l’ordre symbolique, sa bataille décisive contre la monarchie saoudienne, qu’il considère comme un renégat de l’islam, l’usurpateur saoudien des provinces yéménites, dans un combat retourné dont le terme ultime devrait être le rétablissement de sa légitimité, à tout le moins la légitimité du label de son organisation en perte de vitesse au sein du Monde arabe. Avec paradoxalement en observateur passif, à dividendes possibles, l’Iran chiite, et, surtout, la Russie évincée de Socotra, qu’il combattit naguère en Afghanistan pour cause d’athéisme.

IV – La talibanisation du Sahel.

Un an après la chute de Kadhafi, la zone sahélienne a pris l’allure d’une zone de non droit de 4 millions de km2, fief de groupements salafistes, qui auront mis à profit les chaos libyen et malien pour sanctuariser durablement la zone depuis le Nord du Mali. La talibanisation de la Libye sur le modèle Afghan, tant redoutée lors de l’intervention atlantiste contre Tripoli s’est ainsi réalisée, en fait, dans le pays voisin, au Mali, un an plus tard. Un périmètre, sous surveillance électronique de l’aviation américaine depuis leur base du Burkina Faso, vers où convergent désormais les islamistes du Sud du Niger, du Tchad et du Nigeria (Boko Haram).

L’intervention de la France au Mali, en janvier 2013, a relevé d’une stratégie de défense du pré carré africain, face à la politique de grignotage menée tant par la Chine que par le wahhabisme via les finances islamiques (Qatar et Arabie Saoudite). Première opération militaire en solitaire sur un théâtre extérieur depuis la fin de la Guerre d’Algérie, en 1962, la France, via Serval, y joue son rang de puissance. Une  cible idéale en ce que Le Mali constitue le plus grand pays musulman d’Afrique occidentale, où la finance islamique y prospère, alors que les Maliens depuis une décennie se détournaient progressivement de la France vers les pétromonarchies et  que la Chine jouit d’un prestige certain du fait de sa restauration du centre de documentation islamique de Tombouctou. Si la France a réussi à freiner le grignotage wahhabite de ce secteur aux confins de u Mali, du Niger et de l’Algérie, elle n’a pas pour autant stabilisé ni sécurisé la zone, faisant refluer le problème vers la Libye, qui abrite désormais le QG d’AGMI, point de ralliement et d’encadrement des djihadistes de la zone sahélo saharienne. Quatorze pays arabes et africains auraient bénéficié du pillage des arsenaux libyens à la faveur de la chute du Colonel Mouammar Kadhafi, alimentant aussi bien les djihadistes de Libye, que de Syrie ou de Tunisie.

V- Le «surge» d’Al Qaida en Syrie  et  le percement du Canal Ben Gourion.

Si le déferlement djihadiste en Syrie a permis à Al Qaida d’opérer un rebond spectaculaire le plaçant en fer de lance du combat contre l’ultime pays laïc du Monde arabe, la Syrie, le ralliement du Jobhat Al-Nusra, la colonne vertébrale militaire de l’opposition syrienne, à Al-Qaïda, ainsi que son allégeance au successeur d’Oussama Ben Laden, Ayman Al Zawahiri, et sa fusion avec la branche irakienne en vue de fonder un «nouveau califat» à Damas,  ont constitué un revers stratégique majeur à ses anciens parrains, les Etats-Unis et l’Arabie saoudite, deux ans après l’assassinat de Ben Laden, le 2 mai 2011, au Pakistan.

S’il a provisoirement réduit la pression sur l’Arabie saoudite, l’engagement massif d’Al Qaida dans le pays qui fut le siège du premier empire arabe, l’Empire Omeyade, a augmenté les risques de dissémination de terrorisme de basse intensité dans les pays européens d’accueil à forte immigration arabo-musulmane, indice indiscutable de l’échec de la guerre décennale contre le terrorisme, symptomatique du fléchissement des Etats Unis dans la gestion des affaires du Monde. En témoignent les négociations de Doha entre  Américains et talibans, vainqueur a posteriori de la guerre d‘Afghanistan.

Al Qaida et la confrérie musulmane constituent les deux seules organisations transnationales de la sphère arabo musulmane, l’une à vocation politique, l’autre à vocation terroriste, c’est-à-dire vouée à exercer une nuisance destructrice, jamais constructive. Si Ben Laden a exonéré les Occidentaux de leur dette d’honneur à l’égard des arabo-musulmans et des africains, en substituant la thématique de la «guerre contre le terrorisme» au seul vrai débat qui vaille la contribution du monde arabo-musulman au triomphe du camp occidental dans la guerre froide soviéto-américaine et à la libération de la France du joug nazi, les Frères Musulmans au pouvoir dans trois pays arabes (Egypte, Libye Tunisie), équation incontournable en Syrie et à Gaza, paraissent tétanisés par le poids des contradictions que leur comportement ambigu a suscité le long de leur carrière entre connivence souterraine avec le camp atlantiste et dénonciation publique de leur politique de soutien à Israël.

Deux ans après le déclenchement du printemps arabe, alors qu’Al Qaida et sa motrice formatrice, les Frères Musulmans, multipliaient les communiqués de victoire sur tous les fronts arabes, au rythme des concessions arabes sur le problème palestinien, sur fond d’un paysage dévasté d’un champ de ruines généré par la guerre mercenaire menée par des Arabes contre des Arabes pour le plus grand profit de leurs ennemis communs, Israël  et les Etats Unis, le Sud Soudan et le Kurdistan irakien étaient promus au rang de plateformes opérationnelles israéliennes sur les deux versants du Monde arabe, en superposition à la tenaille turque, avec une Palestine à l’abandon, en état de décomposition avancée, l’Irak, le Yémen, le Soudan, la Libye et la Syrie étaient déchiquetés par des guerres sectaires.

Le dernier sommet arabe de Doha, en avril 2013, constitue à cet égard un chef d’œuvre de mystification. Brièvement tenu sous les auspices du Qatar, le demiurge moderne du Monde arabe, le sommet s’est borné à  proposer la création d’un fonds pour Jérusalem d’un milliard de dollars, auquel son émirat contribuerait à hauteur de 250 millions. Pour «défendre Al-Qods», le secteur arabe de Jérusalem, troisième lieu saint de l’islam après La Mecque et Médine, précisera Cheikh Hamad Al Thani critiquant au passage «Israël et ses agissement» son allié souterrain dans l’étranglement financier de l’autorité palestinienne via la rétention des recettes douanières des exportations de Cisjordanie.

Un milliard de dollars pour Al Qods et rien pour l’autorité palestinienne, alors que le Qatar finance le mouvement islamiste Hamas, grand rival de Mahmoud Abbas, qui contrôle la bande de Gaza. S’agit-il de marginaliser l’Autorité palestinienne, pourtant reconnue par la communauté internationale comme l’interlocuteur d’Israël pour faire la paix au profit de ses amis islamistes liés aux Frères Musulmans?

Véritable pavé dans la marre, la démission du premier ministre palestinien Salam Fayyad a mis à nu la réalité de l’Autorité palestinienne et de toutes les contradictions internationales et locales dont elle est à la fois victime et actrice en ce que Ramallah est reconnue comme Autorité légitime, alors que le président de l’Autorité Mahmoud Abbas est sans mandat électif, que le gouvernement quand bien même considéré comme le seul interlocuteur de la communauté internationale, est dans l’illégalité totale depuis 2007 et que Salam Fayyad a été installé au poste de premier ministre par les bailleurs de fonds internationaux, notamment les Etats-Unis. Une vacuité politique, juridique et financière, sans légitimité….prélude au délitement de la Palestine.

L’expérience de la colonisation de la Palestine a conduit Israël à coloniser des terres à travers le Monde représentant vingt fois sa superficie au détriment des populations et de l’environnement des pays pauvres. En République Démocratique du Congo pour la culture de la canne à sucre; au Gabon pour la culture du Jatropha, nécessaire à la production de biocarburants; en Sierra Leone où la colonisation israélienne représente 6,9 pour cent du territoire de ce pays de l’Afrique de l’Ouest.

Pareille passivité –connivence ?- a été observée à l’égard de la Syrie lors des raids israéliens dans la banlieue de Damas, en mai 2013, en soutien à des opérations de harcèlement djihadistes contre le pouvoir central. Pas un état arabe ou islamique n’a saisi le Conseil de Sécurité pour des sanctions contre Israël à la suite de cette opération qui a fait près d‘une quarantaine de tués dans les rangs de l’armée syrienne.

L’ultime pays du champ de bataille contre Israël, partenaire de l’Egypte dans trois confrontations majeures contre l’état hébreu, a été expulsé de la Ligue Arabe par une coalition monarchiques de huit pays abritant de bases militaires occidentales (Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes Unis, Jordanie, Koweït, Maroc, Qatar, Oman) ainsi que de deux confettis de l’Empire Djibouti et les Comores), alors qu’israêl sans tirer le moindre coup de feu accentuait son emprise sur les ressources du Monde arabe et su son pouvoir décisionnaire.

VI-La bataille des eaux du Nil  et Le Canal Ben Gourion (8).

L’épisode de la répartition des eaux du Nil et de la sécession du Sud Soudan auront constitué la plus grosse pantalonnade de l’histoire égyptienne contemporaine. Pour atteindre cet objectif, Israël avait mené une stratégie à double détente qui révélera la cupidité des investisseurs égyptiens et coutera le pouvoir à Moubarak et sa place dans l’histoire. Israël avait négocié avec l’Egypte, tout en faisant des pressions indirectes sur lui, incitant les états africains à réclamer une majoration de leur quote-part dans la répartition hydraulique du cours d’eau, alléchant les Africains par des projets économiques et les investisseurs égyptiens par des promesses d’intéressement aux projets israéliens. En Ethiopie, Israël a financé la construction de dizaines de projets pour l’exploitation des eaux du Nil Bleu. L’accès d’Israël au périmètre du bassin du Nil, via le sud Soudan avec le concours français et américain, s’est doublé de la mise en route de la construction d’un Canal reliant la Mer Rouge à la Mer Méditerranée, depuis Eilat.

Disposant de deux voies de navigation, l’un pour l’aller, l’autre pour le retour, le canal israélien, contrairement à l’Egyptien concurrencera fortement le Canal de Suez et entrainera une perte de 50 pour cent des recettes égyptiennes de 8 milliards de dollars par an à 4 milliards. D’un cout de 14 milliards de dollars, il sera financé par un prêt de trois banques américaines, à faible taux d’intérêt (1%) sur trente ans. 150.000 ouvriers majoritairement d’Asie, principalement de Corée du Sud, participeront aux travaux de construction qui dureront trois ans. Plus long de 50 mètres que son rival égyptien, le canal israélien pourra absorber les plus grands bateaux du monde (longueur 300 mètres, largeur 110 mètres). Sur fond de guerre de religion de l’Islam wahhabite contre la dissidence musulmane, sous couvert de «Printemps arabe», (Syrie, Mord Mali), un tel projet pourrait constituer, à n’en pas douter, sinon un Casus Belli, à tout le moins un désastre économique majeur pour l’Egypte et entrainer sinon une rupture des relations diplomatiques, à tout le moins une glaciation durable des rapports entre les deux pays.

Israël proposerait à la Jordanie d’aménager des sites touristiques sur la voie d’eau afin de neutraliser une éventuelle réaction de la part du deuxième pays arabe signataire d’un traité de paix avec Israël. Sur les berges du canal israélien seront aménagées des sites touristiques avec hôtels de luxe, lieux de distraction en vue d’en faire un gigantesque complexe touristique dont le périmètre sera placé sous haute surveillance électronique avec détection Laser. Le Qatar avait auparavant proposé à l’Egypte de lui louer le Canal de Suez pour cinquante ans pour la somme de cinquante milliards de dollars afin de renflouer l’économie égyptienne, à charge pour le Qatar d’assurer la sécurité de la navigation, notamment la péninsule de Sinaï des attaques terroristes et de rassurer ainsi les israéliens.

La protection du Canal et de la Péninsule du Sinaï devait être assurée par des compagnies militaires privées. La principauté avait fait la même offre à la Russie de leur louer leur base de Syrie  et de les placer sous la protection de l’Armée Libre de Syrie, en échange de l’infléchissement de leur position  dans le conflit de Syrie. Le Qatar se proposait de déployer Black Water, les mercenaires américains qui se sont illustrés en Irak, pour cette tâche. En fait l’Egypte perdrait sa souveraineté. L’idée en a été soufflée par les israélo américains et viserait à empêcher l’Egypte de déployer des troupes supplémentaires, notamment une aviation dans le Sinaï.  Mais le projet battait de l’aile car depuis la 2 me attaque israélienne contre Gaza (Novembre 2012) et le rôle joué par l’Egypte, les Américains étaient satisfaits du rôle de prestataire de service du président égyptien Mohamad Morsi. Youssef Al-Qaradawi, le prédicateur médiatique, avait d’ailleurs menacé l’Egypte de lui couper une aide de 20 milliards de dollars promise en cas de mise en échec de Morsi par le protestataire anti constitution.

Nasser avait les yeux rivés sur Tel Aviv, le néo islamisme djihadiste pétrolier rêve d’un califat, alors qu’Israël doté du feu nucléaire, d’un dôme d’acier anti missiles, de cinq sous-marins fournis par l’Allemagne, de deux plateformes opérationnelles au cœur du Monde arabe, au sud Soudan, sur le parcours du bassin du Nil, au Kurdistan irakien, à la charnière du monde arabo-turco-iranien, a parachevé la phagocytose de la Palestine transformée en lambeaux, entreprenant une colonisation des terres d’une superficie vingt fois supérieures à son territoire originel, réussissant à détourner partiellement les quotas hydraulique du Nil au bénéfice de ses alliés, démarche ultime avant l’estocade finale la construction d’un canal rival au Canal de Suez et la reconnaissance d’Israël comme «Etat Juif», verrouillant toute revendication future des Palestiniens à un hypothétique «Droit au retour» sur la terre de leurs ancêtres.

Nasser avait les yeux rivés sur Tel Aviv, quand ses successeurs, les islamistes revanchards destituaient sa statue en Libye, que Youssef Al Qaradawi, le prédicateur de l’Otan, implorait les Américains de bombarder la Syrie, tournant le dos à leur histoire nationale à la quête d’un passé mythique, sans doute problématique, alors que les combattants palestiniens de Syrie prenaient en otage des Casques Bleus de l’Onu à la frontière syro israélienne, plutôt que de se lancer dans un combat visant la libération de leur terre natale que le Hamas, bénéficiaire de l’hospitalité active de la Syrie pendant seize ans, s’alliait avec Al Qaida pour s’emparer du contrôle de camp Yarmouk dans la banlieue de Damas pour en faire un vivier de combattants anti-régime baasiste, troquant une alliance stratégique pour une nouvelle alliance sur une base sectaire, le sunnisme wahhabite, et son alignement sur les pétromonarchies, les vassaux des Etats-Unis.

Indice d’une défragmentation mentale absolue, sans pareille dans les annales des relations internationales, dont les vassaux wahhabites de l’Amérique, l’Arabie saoudite et le Qatar,  en portent la très lourde responsabilité.

Comments


  • Cher Monsieur,

    Je me permets de vous écrire car je viens de lire votre article « La métaphore de Suez » et je ne comprends pas bien l’histoire du canal Ben Gourion. En particulier quel en serait le tracé? Il atterrirait où en Méditerranée ? A côté de Ashdod? Ca me parait bien long depuis Eilat, plus long que les 50 mètres que vous indiquez. Avez-vous des cartes du tracé, je n’en ai pas trouvées?

    Cordialement,

  • réponse à Sylvette A ptopos du Canal Ben Gourion
    Il s’agit d’un canal à double voie l’un pour l’aller Méditerranée- Akaba- Mer rouge (je préfère dire Akaba le nom originel qu’Eilath), l’autre pour le retour,
    alors que le Canal de Suez est d’une seule voie, où la navigation est alternée les jours pairs pour aller vers la mer rouge les jours impairs vers la Méditerranée. Il ne s’agit pas d’une voie linéaire. Mais d’une voie d’eau sur laquelle se grefferont des sites touristiques, des stations balnéaire tant du coté jordanien, un peu comme la navigation sur le Mississipi aux Etats-Unis. L’information est parue une première fois dans le journal transarabe Al Qods al Arabi » que j’ai reprise longuement dans un papier Chine Afrique 2/4 La France: la défense du pré carré en tandem avec Israel.

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