Médias arabes 2/2: La fin annoncée de la presse off shore arabe
La presse off shore arabe La déconfiture d’Al Hayat et de Radio Orient notamment remettent en mémoire le rôle traditionnel…
La presse off shore arabe
La déconfiture d’Al Hayat et de Radio Orient notamment remettent en mémoire le rôle traditionnel de la presse off shore arabe, dont la mort a été programmée par les déboires des vecteurs pro atlantistes, de même que par l’apparition de nouveaux modes de communication et par l’évolution des stratégies de la guerre médiatique.
Pour le lecteur arabophone, sur ce lien les difficultés du journal «Al Hayat»
De tradition séculaire, l’existence d’une presse off shore arabe a longtemps été une particularité du Monde arabe, amplifiée durant la décennie 1980, au paroxysme de la guerre froide soviéto-américaine dans la guerre anti soviétique d’Afghanistan, par un exceptionnel concours de circonstances: L’existence d’un important dispositif médiatique arabe périphérique et d’un auditoire arabo musulman substantiel au cœur du Monde occidental (Europe – États Unis) et La présence d’une active nébuleuse islamiste sur le continent européen.
Cette conjonction va déboucher sur une convergence sans équivalent dans les annales de la communication internaitonale, conférant au déploiement médiatique arabe hors de son champs national une dimension stratégique en ce qu’elle donné un prolongement extraterritorial à la circulation de l’information et brisé de ce fait le monopole occidental sur l’actualité internationale.
Le déploiement transcontinental arabe a compensé dans une très large mesure les handicaps structurels et politiques de leurs commanditaires, faisant d’eux des organes de référence pour tout un lectorat réticent à une interprétation exclusivement occidentaliste de l’actualité internationale.
Si, dans les pays occidentaux, l’expansion de la presse a été liée au développement de la société industrielle et au progrès de la démocratie, il n’en a pas été de même dans les pays arabes, d’une manière générale dans le tiers monde, où coexistent pour des raisons tant historiques que politiques une presse nationale et une presse périphérique.
Partout ailleurs dans le monde, la presse se déploie d’abord dans son espace national, son socle principal en matière de subsistance et d’influence, où elle réalise l’essentiel de ses recettes par ses ventes que la publicité. Il en a été différemment dans le Monde arabe.
Née d’abord dans les pays d’émigration, souvent à l’initiative du pouvoir colonial, l’apparition de la presse périphérique arabe a été antérieure à la naissance de la presse nationale. La Bibliothèque Nationale à Paris possède des exemplaires d’un journal arabe paru à Paris en 1867 «Al Moustashari».
Installée dans la métropole coloniale ou dans un pays limitrophe, en tout cas hors du Monde arabe, mais destinés au marché arabe, les journaux périphériques ont disposé d’une plus grande liberté de ton et joué le rôle de «soupape de sûreté», complémentaire aux médias officiels locaux. Leur influence, à ce titre, a été supérieure à celle des journaux locaux.
Pour le personnel de ces vecteurs, la presse périphérique représentait le Pérou: une «prime d’expat» dans une des villes les plus huppées d’Europe, Londres., Paris. D’où l’attrait qu’exerçait cette fonction en dépit des lourdes servitudes qu’elle impliquait en matière de flexibilité idéologique et de prosternation hiérarchique.
Paris, laboratoire de fermentation de la première tentative de création d’un journal trans islamique.
Les premiers journaux arabes, tel «Mira’t Al Awhal» (Le miroir des situations) se sont installées, curieusement, à Istanbul, capitale de l’Empire ottoman, avec les encouragements du gouvernement turc dans l’intention d’en contrôler l’orientation et la diffusion, dans l’intention d’en faire un outil de propagande auprès des populations arabophones.
L’expérience tourna court et ce journal, fondé en 1855 par un chrétien d’Alep, Rizkallah Hassoun devra s’expatrier à Londres, bientôt rejoint à Paris par des intellectuels fuyant le joug de la Sublime porte, dont ils entendaient combattre la répression à travers leurs journaux.
La France, protectrice des chrétiens d’Orient, abritera, à partir de 1880, plusieurs journaux arabes: Al Ittihad (L’Union), Al Anba’ (Les nouvelles), Al Raja (L’espoir). Amorce d’une forme embryonnaire d’action psychologique, ils constitueront autant d’illustration de sa politique au Levant et au Ponant (Maghreb) à l’intention des élites arabes.
Bénéficiant du prestige des idéaux de la Révolution Française, Paris sera le laboratoire de fermentation de la première tentative de création d’un journal trans islamique avec l’expérience d’ «Al Orwa Al Wouthqa» (le Lien Solide), menée depuis la capitale française par l’homme politique afghan Jamal Eddine Al Afghani et Cheikh Mohammad Abdou, un des théoriciens de l’Islam moderniste. Fondé en 1884, l’hebdomadaire politique et littéraire, interdit en Egypte, y sera distribué clandestinement. Engagés dans les débats de leur époque, les éditeurs de la publication, notamment Jamal Eddine Al Afghani, engagera une sévère polémique avec Ernest Renan sur la contribution de l’Islam au développement de la science, l’historien français niant l’apport arabe et musulman à la science notamment, l’Algèbre (Al Jabr), la chimie (al kimia’), les algorythmes (Al Khawarizmi).
Vaste débat toujours d’actualité, qui dénote chez les occidentalistes, une farouche volonté de négation de la contribution des Arabes et des Musulmans à la civilisation universelle.
Sur fond de stratégie apocalyptique du djihadisme planétaire, initiée par Al Qaida puis par Daech, ce débat se perpétue de nos jours dans sa forme moderne sous la double interrogation suivante: Moderniser l’Islam ou Islamiser la modernité? Comme pour suggérer une incompatibilité fondamentale entre les deux termes de l’équation.
Quoiqu’il en soit, ce n’est qu’ultérieurement que les journaux arabes feront leur apparition dans les pays arabes eux-mêmes.
D’abord au Liban, en Syrie et en Égypte, à l’époque de la Renaissance arabe «An Nahda», dont certains journaux ont été fondés par des libanais expatriés, comme ce fut le cas du plus illustre quotidien égyptien «Al Ahram» (Les Pyramides), lancé par les frères Salim et Béchara Taqla, le 5 août 1876. Puis ce fut au tour du Maghreb, dénommé alors l’Afrique du Nord Française, et du Golfe, où les premiers journaux nationaux sont apparus au lendemain de la 2eme Guerre mondiale. Forgée au XIX e siècle, la tradition s’est perpétuée tout au long du XX me siècle.
Lors de la guerre du Liban (1975-1990), la capitale française retrouvera son rôle de havre de liberté de la presse, en accueillant une trentaine de publications libanaises et arabes, notamment «Al Mostaqbal» qui opérait là un retour aux sources, avant de sombrer dans la faillite et d’être racheté par le milliardaire libanais saoudien Rafic Hariri.
La stabilisation de la situation au Liban a entraîné le reflux vers Beyrouth de la presse arabophone alors que se maintenaient à Paris les publications d’expression française «Les Cahiers de l’Orient» et «Arabies». Les autres publications arabes qui avaient trouvé refuge à Paris durant la guerre du Liban «Al Watan Al Arabi» (La Nation Arabe), objet d’un attentat en 1982, ainsi que Kol Al Arab (Tous les arabes), revue pro-irakienne fermée à Paris au moment de la guerre du Golfe, tout comme at Taliha al Arabiya (L’avant garde arabe) ont sombré avec la mort de leur commanditaire Saddam Hussein.
Un déploiement conforme à la stratégie occidentale
Si la décennie 1980 a vu la floraison de la presse périphérique pro-irakienne en soutien de la guerre de l’Irak contre l’Iran Khomeinyste (1980-1989), les décennie suivante verra la floraison de la presse pro-wahhabite, particulièrement à Londres, en soutien au Djihad, le combat de la Légion islamique en Afghanistan, en Bosnie, au Caucase, dans la chasse gardée soviétique en vue de provoquer l’implosion de l’Empire soviétique, dans un déploiement conforme à la stratégie occidentale.
Pour une poignée de pétrodollars, l’Europe deviendra la principale plate-forme de l’Empire médiatique saoudien, le principal refuge des dirigeants islamistes, réussissant même le tour de force d’abriter davantage de dirigeants islamistes que l’ensemble des pays arabes réunis.
Londres, capitale mondiale de l’Islam contestataire et plate-forme du déploiement médiatique international saoudien
Soixante dirigeants islamistes résidaient en Europe occidentale depuis la guerre anti soviétique d’Afghanistan, dans la décennie 1980, où les djihadistes étaient gratifiés du titre de «combattants de la liberté» par le fourbe du Panshir, Bernard Henry Lévy, l’interlocuteur virtuel du Lion du Panshir, le commandant Massoud Shah. Quinze d’entre eux disposaient du statut de «réfugié politique», dans la plupart des pays européens, Royaume Uni, Allemagne, Suisse, Norvège, Danemark.
Londres était en outre la plate-forme stratégique du déploiement médiatique international du Royaume Wahhabite qui y avait entreposé l’essentiel de sa force de frappe: Une chaîne transfrontalière MBC (Middle East Broadcasting Center), deux radios à diffusion transcontinentale MBC FM et la radio communautaire britannique SPECTRUM, ainsi que cinq publications dont deux fleurons de la presse arabe «Al Hayat» et «Al Charq Al Awsat», avec leur inévitable contrepoint nationaliste: «Al Qods Al Arabi (la Jérusalem Arabe) du temps où le journal était dirigé par son fondateur Abdel Bari Atwane, ainsi que Sourakia, dont la nom résulte de la contraction des noms de Syrie et d’Irak, deux pays à l’époque dirigés par le part Baas et dont il réclamait la fusion.
La presse Off shore arabe, un instrument de la stratégie oblique de l’information
Instrument de la stratégie oblique des gouvernements, la presse périphérique permet d’accréditer la thèse du commanditaire sans que cela lui soit directement attribuable ou qu’il y soit directement impliqué. Citée comme référence, elle peut être désavouée en cas de nécessité, selon les impératifs du jeu diplomatique, tant il est vrai qu’il est plus facile pour un gouvernement de démarquer de sa publication satellite que d’un journal officiel paraissant dans son propre pays.
Elle est subventionnée directement ou indirectement par la publicité ou d’une manière plus subtile par l’octroi d’un quota de vente, c’est à dire l’achat garanti par un pays d’un nombre déterminé d’exemplaires, une sorte de garantie de ressources pour l’éditeur. Nullement un achat à perte en ce que le commanditaire se charge d’en assurer la distribution dans les lieux publics de son pays, Hôtels de luxe, grands restaurants, salon d’honneur des aéroports, comme autant de point de publicité perlée au bénéfice du commanditaire.
Subvention déguisée, le contingentement est une arme à double tranchant. S’il assure des rentrées financières régulières, il rend l’éditeur tribut aire du pays commanditaire, excluant toute possibilité d’expansion de son marché sans l’autorisation de son bailleur de fonds, avec le risque inhérent d’une perte totale du marché en cas d’impertinence journalistique. En 1986, lors du bombardement de Tripoli (Libye) par l’aviation américaine, les médias libyens ont abondamment cité dans leurs revues de presse les articles paraissant à l’étranger dans les journaux à leur dévotion, comme pour justifier l’ampleur de l’adhésion internationale à la cause libyenne.
Autre fonction de la presse périphérique, elle permet d’adresser des «messages codés» ou des coup de semonce à un pays voisin, sans enfreindre les règles de bon voisinage, tout en sauvant les apparences.
Ainsi, lors de la visite du prince héritier koweïtien Cheikh Saad al Abdallah, à Bagdad, en 1989, à la fin de la guerre irako-iranienne, tandis que les journaux irakiens célébraient la fraternité entre l’Irak et le Koweït, la presse pro-irakienne mettait l’accent, depuis l’Europe,- fait prémonitoire-, sur le prix de sang versé par l’Irak pour protéger ses frères du golfe contre l’Iran, suggérant une compensation financière des pétromonarchies au profit du régime baasiste.
En Août 1995, soupçonnée de passivité dans le conflit bosniaque, l’Arabie saoudite, à grands renforts de placards publicitaires parus dans les journaux à sa dévotion, notamment «Al Charq Al Awsat» de Londres, soulignait l’importance de l’effort financier consentis aux musulmans de Bosnie, en publiant la liste intégrale des donateurs saoudiens et le montant de leur contribution.
Les attaques frontales sont prohibées, en principe, sauf si elles participent d’une politique générale de l’État. Cela a été le cas entre l’Irak et le Koweït, dans la foulée de l’invasion irakienne de la principauté, en 1990 et de la guerre qui s’est en suivie contre l’Irak par la coalition internationale.
Industrie florissante par les subventions substantielles qu’elle génère, elle peut être périlleuse. Certains patrons de presse -tels Salim Al Laouzi (Al Hawadess-Liban) ont payé de leur vie les incertitudes de cette activité lucrative mais aléatoire. D’autres ont connu de brutaux rappels à l’ordre.
Installée à Paris, la revue «Al Watan al Arabi», à l’époque pro-irakienne, a été l’objet d’un attentats rue Marbeuf, en Avril 1982. Le message était si explicite que la France a dû expulser deux diplomates syriens à la suite de cet attentat. Tournant casaque au moment de la Guerre du Golfe, le propriétaire de la revue, Walid Abou Zahr, un obligé notoire de l’Irak, se repliera vers l’Égypte pour mettre à l’abri ses nouvelles convictions sonnantes et trébuchantes acquises auprès des pétromonarchies du Golfe.
Pour se prémunir contre d’éventuels dérapages- ou plus simplement pour se préserver contre de brusques retournements de situation, la disgrâce peut être aussi soudaine que la promotion spectaculaire, des patrons de presse, habiles, ont jugé prudent de recruter des journalistes couvant la gamme des sensibilités politiques arabes, à raison d’un homme pour chaque pays, se muant ainsi en chef d’orchestre de la convivialité politique arabe.
Al Charq Ak Awsat et Al Hayat, porte étendards de la pensée wahhabite.
A – Al Charq Al Awsat», le journal aux couleurs vertes de l’Islam et du dollar, collecteur de fonds du djihad.
Dans l’ambiance d’exaltation délirante de la période du Djihad afghan (1980-1989), le journal aux couleurs vertes, la couleur de l’Islam et du dollars, -une combinaison idéale pou lever des fonds en faveur du djihad-, va faire office d’oracle pour une population en état de lévitation sur fond de religiosité niaise et d’infantilisme religieux, quand bien même il posait de sérieux problèmes à ses lecteurs en ce que la coloration verte de ses pages en interdisait un usage profane, particulièrement en tant que papier d’emballage.
Disposant de l’exclusivité pour le Monde arabe des articles du Wahington Post, d’USA Today et de Global Viewpoint ainsi que de dizaines de plumes arabes convertis aux vertus du Roi dollars, Al Charq Al-Awsat, se hissera, par son tirage, au premier rang des journaux trans-arabe, nullement le plus influent au sein des élites intellectuelles, plus certainement au sein de la population.
Premier quotidien arabe à utiliser la transmission satellitaire pour l’impression simultanée dans plusieurs villes dans le monde, avec un tirage de l’ordre de 200 000 exemplaires, imprimé simultanément dans 12 villes sur 4 continents, avait mission de répandre la bonne parole qui retentissait comme autant de mots d’ordre sur l’ensemble de la Oumma.
Salmane, propriétaire de cet important groupe de presse, «Saudi Research and Marketing ltd», a ainsi orchestré pendant plus de 30 ans, à travers la totalité des 15 périodiques de son empire médiatique les campagnes de collecte de fonds au profit des «arabes afghans», les ancêtres des djihadistes salafistes, tant en Afghanistan, qu’en Bosnie-Herzégovine, qu’en Tchétchénie, qu’au début du printemps arabe contre la Syrie.
À journées faites, sur de pleines pages, Al Charq Al Awsat mentionnait, dans la pure tradition de l’économie ostentatoire, les contributions des donateurs dans un style qui incitait à l’émulation. Des annonces reprises, au diapason, par les autres publications du groupe: Arab News, Al Majalla, Urdu News, Arrajol, et Al Iqtissadiyah.
Fondé en 1978 par Kamal Adham, ancien chef des services de renseignements saoudiens du temps du Roi Faysal dont il était le beau frère, -l’homme du voyage de l’égyptien Anouar El Sadate en Israël- As Charq Al Awsat, le fleuron de ce groupe de presse, sera la pierre angulaire du dispositif médiatique saoudien à une période charnière du Moyen Orient à la veille de la chute de la dynastie Pahlévi en Iran et de l’instauration de la République islamique iranienne (Février 1979), de la conclusion du traité de paix israélo-égyptien (Mars 1979) et de la guerre des pétromonarchies contre l’Iran, via l’irakien Saddam Hussein (Septembre 1979).
Salmane, à l’époque prince héritier, diluera sa participation dans ce holding, à la mi 2014, dans une démarche symbolique destinée à prendre ses distances avec les collecteurs de fonds des djihadistes au moment où ses anciens compagnons de route faisaient mauvaise presse dans les pays occidentaux par leurs abus, alors que la santé du Roi Abdallah, chancelante, lui laissait entrevoir les portes du pouvoir.
B – Al Hayat
Fondé en 1946, Al-Hayat a refait surface en 1988-89 après une éclipse de 20 ans, consécutive à l’assassinat de son fondateur Kamel Mroueh, pote voix de la dynastie wahhabite dans son combat le nationalisme arabe du chef charismatique des Arabes, Gamal Abdel Nasser.
Sa renaissance intervient à une période charnière de l’histoire du monde arabo-musulman marquée sur le plan régional par l’implosion de l’Union soviétique et l’ouverture des Républiques musulmanes d’Asie centrale au jeu diplomatique régional, et, sur le plan européen, par la prise de conscience politique de la population arabo maghrébine, la «troisième génération» issue de l’immigration.
Sous la houlette de Jihad Al-Khazen, ancien collaborateur de Kamel Mroueh, «Al-Hayat» se rode pendant deux ans après une longue hibernation, puisant son équipe dans le vivier constitué par son rival traditionnel, le quotidien libanais «An-Nahar».
Dans le prolongement de la stratégie saoudienne, «Al-Hayat» donnera sa pleine mesure durant la première du guerre du Golfe (1990-1991). Depuis Londres, son nouveau siège, il participera activement au débat sur le nouvel ordre international et la faillite des idées nationalistes, allumant au besoin des contre-feux face à ce qu’il considère être la subversion islamiste.
Passé sous le contrôle du Prince Khaled Ben Sultan, fils du ministre saoudien de la Défense et chef des troupes saoudiennes au sein de la coalition anti-irakienne, «Al-Hayat» recrute au prix fort les plus en vue des intellectuels de la diaspora arabe.
Luxe suprême, il s’offre même au titre de collaborateur régulier un membre du gouvernement russe, Victor Possouvaliouk, vice-ministre chargé du département du Proche et du Moyen-Orient au ministère soviétique des Affaires étrangères.
La presse off shore arabe a connu un «âge d’or» durant deux décennies (1980-2000) de la guerre d’Afghanistan à l’invasion américaine de l’Irak, en 2003. Elle cédera la place à «l’embedded», la marque de fabrique de la guerre d’Irak (2003), puis au «média individualisé» lors de la guerre de Syrie avec l’intervention directe des «médiactivistes», des bi nationaux faisant office de porte voix et de porte serviette, opérant en roue dentée de la diplomatie de l’ancienne puissance colonisatrice de leur pays d’origine.
La bataille de Syrie a en effet constitué un tournant majeur dans la guerre médiatique moderne, par son ampleur, sa durée et sa violence, de même que par la démultiplication des outils de communication individuels (blogs, Facebook, twitter). En superposition aux médias traditionnels, cette déclinaison médiatique a entraîné une surexposition de l’information et mis en œuvre de nouveaux intervenants sur la scène médiatique, de nouveaux prescripteurs d’opinion, recyclés via la notoriété du micro blogging en autant d’amplificateurs organiques de la doxa officielle. Les drones tueurs de toute pensée dissidente.
La fin du débat contradictoire en somme.
Épilogue
Sept ans après le lancement du «printemps arabe», tous les vecteurs d’accompagnement de la stratégie islamo-atlantiste sont en déconfiture, sanction inéluctable de leur alignement sectaire.
Ce constat vaut également pour les Médias français, particulièrement Le Monde (tirage 40.000 ex/jour) et Libération (30.000 ex/jour) les amplificateurs idéologiques pour le compte du Quai d’Orsay de la guerre de prédation économique du Monde arabe. Propriété de milliardaires, –le trio BNP (Bergé Niel Pigasse) pour le Monde, le franco-israélien Patrick Drahi pour Libération–, ces deux titres n’en bénéficient pas moins d’une subvention gouvernementale française à titre du pluralisme de la presse, sans que ce privilège ne les incite à la décence dans leur entreprise de criminalisation permanente de toute pensée contestataire. En dépit de leurs dérives, plutôt que de se livrer à leur auto-critique, ils s’érigent désormais en aiguillon de la bien-pensance, sous le mot d’ordre «DECODEX» en un pathétique dévoiement de la fonction journalistique.
Une proximité du pouvoir entrave inévitablement la marge de manœuvre d’un média et une proximité avec les puissances d’argent altère irrémédiablement sa fonction critique. Les effets de plume les plus talentueux ne sauraient faire l’économie d’une sérieuse remise en cause de la fonction journalistique. A moins d’un sursaut éditorial qui introduirait une dissonance dans le concert unanimiste pro américain de la zone euro-arabe à l’effet de faire contrepoint aux vecteurs transnationaux occidentaux, la presse arabe, particulièrement libanaise, risque une relégation dans un domaine qui a longtemps constitué son champ d’action privilégié et les médias arabe au XXI me siècle représenteront alors pour la grande presse internationale ce que l’homéopathie constitue pour la pharmacologie, une dose infinitésimale .