Sunday, April 28, 2024
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Flashback : Morsi, la destitution

En prévision des élections présidentielles égyptiennes post Moubarak, qui devaient avoir lieu en Mai 2012, Mohammad Morsi conviera au Caire,…

By René Naba , in Egypte Flashbacks , at 31 juillet 2023

En prévision des élections présidentielles égyptiennes post Moubarak, qui devaient avoir lieu en Mai 2012, Mohammad Morsi conviera au Caire, le 5 février 2012, soit trois mois avant l’échéance électorale  107 oulémas du Monde musulman pour décréter le Jihad contre la Syrie, un pays qui fut le partenaire de l’Egypte dans 4 guerres contre Israël  (1948, 1956,1967 et 1973).

Cette démarche électoraliste sera fatale au premier président islamiste élu dans le plus grand pays arabe. Il sera destitué par l’armée, un an plus tard, qui ne lui pardonnera pas d’avoir porté atteinte à la “fraternité d’armes” entre les armées égyptienne et syrienne.

Ci joint le texte intégral.


Fatwa de 107 Oulémas du Monde Musulman à propos de la guerre de Syrie

Mardi 15 Rabih Al Awal 1434 de l’Hégire, correspondant au 7 Février 2012

Premier communiqué conjoint émanant de la confrérie des Frères Musulmans et des groupements salafistes, signé notamment des personnalités suivantes: Cheikh Youssef Al Qaradawi, prédicateur du Qatar, Rached Ghannouchi, chef du parti An Nahda, la branche tunisienne de la confrérie des Frères Musulmans, ainsi que de deux prédicateurs saoudiens, Awad Al Qarni et Salmane Al Awda

«Il n’est pas permis aux membres des forces armées syriennes, aux forces de l’ordre et à toute autre formation sécuritaire de tuer un membre du peuple syrien ou d’ouvrir le feu contre lui.

Il leur incombe de désobéir aux ordres donnés en ce sens, même si cela doit déboucher sur la mort du soldat récalcitrant. Il leur incombe d’abandonner leur poste et de renoncer à leur mission.

«Il n’est pas permis de continuer à exercer des responsabilités de sécurité et des forces armées dans les circonstances présentes. Il incombe de faire sécession toute affaire cessante.

«Nous lançons un appel à soutenir l’Armée Libre Syrienne (ALS) en vue de la renforcer, d’y adhérer pour contribuer à la défense des civils et des villes cibles du pouvoir, aussi longtemps qu’ils seront présents.

«Nous lançons un appel aux Musulmans et au Monde libre en vue de soutenir les formations de l’Armée Libre Syrienne par tous les moyens matériels et moraux afin de lui permettre d’accomplir sa mission face au pouvoir.

«Nécessité de soutenir les révolutionnaires de Syrie et de leur fournir toute l’aide matérielle et morale pour leur permettre d‘accomplir leur révolution et de récupérer leur liberté et leurs droits.

«Nous invitons les États arabes et musulmans à arrêter une ferme position face au régime syrien, en expulsant ses ambassadeurs et à rompre les relations avec lui.

«En ce qui concerne les pays qui le soutiennent, en particulier la Russie et le Chine, nous lançons un appel aux peuples musulmans d’adresser des messages de protestation à ces deux états; de manifester devant leurs ambassades partout dans le monde; de boycotter leurs produits afin  qu’ils ne veillent pas à préserver leurs intérêts économiques et militaires en Syrie par l’effusion du sang.

«Que ces deux pays sachent que l’avenir de cette zone appartient à ses peuples, quel que soit le temps que cela prendra.

«Quiconque fait le pari des régimes répressifs disposés à tuer leurs peuples, sera inéluctablement perdant».

«Nous lançons un appel sincère au sein du Monde musulman en vue de constituer des comités populaires, de déployer tout ce qui leur  est possible de le faire pour apporter leur soutien à la révolution du peuple syrien, et d’apporter leur aide aux réfugiés et déplaces syriens, notamment ceux déployés en Turquie, en Jordanie et au Liban où ils éprouvent de gros besoins en nourritures, médicaments, logement et soutien matériel.

Mise en perspective

Qatar-Syrie: En tandem avec la France, le pari sur les Frères Musulmans, un mauvais pari sur un mauvais partenaire.

Le Qatar était impliqué dans le dossier syrien «jusqu’à la moelle».

Il a contribué à dévier un mouvement animé par des revendications populaires vers un conflit entre le régime syrien et des «djihadistes sans frontières», secondés par des «frérots», otages jusqu’à l’obsession d’une stratégie de conquête de pouvoir.

En concertation avec la Turquie, le Qatar a mis au point un plan visant à changer le régime en Syrie, en garantissant la mise du Conseil National Syrien sous tutelle des Frères Musulmans. Et, dans l’hypothèse de l’échec de cette structure, de favoriser la militarisation du soulèvement populaire, au départ un mouvement civil de contestation, par la démultiplication des formations combattantes et la légitimation du Jihad mondial en Syrie.

Mais en Syrie, le Qatar a fait un mauvais pari sur un mauvais partenaire en ce que la confrérie jouissait d’une faible adhésion populaire contrairement à la branche égyptienne. Nonobstant notre position à l’égard de la nature criminelle et répressive du régime syrien, il nous importe de rappeler les faits suivants:

La Syrie a refusé de souscrire aux requêtes américaines concernant la fermeture des bureaux de représentations du Hamas et du Jihad Islamique Palestinien, installés à Damas. Ce refus a été signifié par Farouk Al Chareh, à l’époque ministre syrien des Affaires étrangères à son homologue américain Colin Powell. Ce refus a servi de déclencheur à la mise en route de la procédure législative visant à l’adoption de la «Syrian Accountability Act» et à la détérioration conséquente des relations entre la Syrie et les États-Unis.

Il est de notoriété publique que la Syrie avait aménagé, à l’intention du Hamas et d’autres organisations populaires, des camps d’entraînement militaires et des bureaux de représentation politique.

Le Qatar s’est mis à se comporter comme une grande puissance régionale, collaborant avec l’OTAN pour provoquer la chute du Colonel Mouammar Kadhafi, soutenant par tout moyen les Frères Musulmans d’Égypte pour succéder à Hosni Moubarak, mettant à la disposition du parti An Nahda, la branche tunisienne de la confrérie, d’importants moyens financiers, propulsant directement ses membres de la prison au parlement.

Illustration

(Amr Dalsh Reuters)