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Marine Le Pen au Liban: un échange de bons procédés entre des forces d’extrême droite

La visite de Marine Le Pen au Liban a constitué un échange de bons procédés entre des forces d’extrême droite,…

By René Naba , in Actualités Politique , at 7 mars 2017

La visite de Marine Le Pen au Liban a constitué un échange de bons procédés entre des forces d’extrême droite, dont le premier ministre libanais Saad Hariri, et les grands partis politiques français auront été les dindons de la farce», a estimé René Naba dans une interview lundi 27 Février 2017 Radio Clé des Ondes – Bordeaux.

Marine Le Pen La Ahlan Wa la Sahlan

« Marine le Pen n’est ni la bienvenue au Liban. Elle ne fait partie non plus de la famille libanaise». Cette manchette en gros caractère du journal de gauche « Al Akhbar », publiée samedi 18 Février 2017 à la veille de la visite au Liban de la dirigeante d’extrême droite française, résume bien l’état d’esprit dominant dans les milieux progressistes et patriotiques libanais face à cette visite hautement controversée.

Hormis cette manchette et les raisons la justifiant, Al Akhbar, proche du Hezbollah, a assuré un service minimum pour la couverture de cet événement. Contrairement à l’Orient Le Jour qui a couvert abondamment la visite de Mme Le Pen, pourtant jalonnée de manifestations et de pétition de protestation.

Sur ce lien la version sonore de l’entretien conduit par Gilbert Hanna, directeur de cette radio associative, en pôle position dans la région Nouvelle Aquitaine.

L’empathie du quotidien francophone vis à vis de cette visite s’explique par le rôle occulte de soutien financier assumé par la bourgeoisie chrétienne aux milices chrétiennes durant la guerre civile libanaise (1975-1990) dont le quotidien francophone en est le porte parole.

Ce faisant, il ne fait que traduire la sympathie que nourrit cette bourgeoisie francophone à l’égard du Front National, qui fut un soutien actif des milices chrétiennes libanaises durant la guerre civile (1975-1990).

Des volontaires du FN ont en effet pris part aux batailles du Chouf (Mont Liban), en 1983-194, sous la présidence du phalangiste Amine Gemayel, opposant les milices chrétiennes à leurs adversaires palestino-progressistes.

Un des avocats de Samir Geagea, l’actuel chef des milices chrétiennes, par ailleurs un des grands criminels de guerre du Liban, responsable de l’élimination physique de ces principaux rivaux dirigeants chrétiens libanais (Tony Frangié et Dany Chamoun), en sus de son implication dans le massacre des camps palestiniens de Sabra Chatila (1982) a pour avocat français Wallerand de Saint Just, le trésorier du FN.

Quant au président Michel Aoun, frappé d’ostracisme par le pouvoir chiraquien tout au long de son exil de quinze ans en France (1990-2005), en raison du partenariat affairiste noué entre Jacques Chirac et Rafic Hariri, il a bénéficié, par défaut, de la sollicitude de Jean Marie Le Pen, lequel a mis à profit cette quarantaine injustifiée pour cultiver l’amitié de l’exilé de France, lui rendant une demi douzaine de visites.

Le précédent Macron, -La visite au Liban d’Emmanuel Macro, lui aussi candidat à l’élection présidentielle française, – a servi de prétexte à la visite de Mme le Pen, qui a pour objet principal de donner une visibilité internationale à la dirigeante du parti xénophobe tout en s’acquittant pour les milices chrétiennes d’une dette de gratitude à l’égard d’un allié sur la même longueur d’onde idéologique.

La France et Saad Hariri, les dindons de la farce

La France et Saad Hariri se retrouvent comme les dindons de la farce. En recevant sans contrepartie Mme Le Pen, le premier ministre musulman sunnite a donné crédit à ses thèses, sans la moindre concession de la part de la candidate à l’élection présidentielle française.

Les milices fascistes libanaises ont en effet réservé un accueil royal à un parti, le FN, qui se présente comme l’adversaire idéologique majeur des deux grands partis français qui ont gouverné la France depuis un demi siècle: Le parti gaulliste dans ses diverses déclinaisons, néo gaulliste et post gaulliste, ainsi que le Parti socialiste.

Quant à son incident surgi à la suite de son refus de porter le voile en prévision de son entrevue avec le Mufti de la République, Cheikh Abdel Latif Deriane, elle a constitué une opération préméditée à dividende électoraliste à l’intention des électeurs français pour l’évidente raison que pour une audience avec la Reine d’Angleterre, le protocole immuable impose la révérence des dames.

Il en est de même pour une audience pontificale, une mantille s’impose, tout comme la visite d’une mosquée présuppose le déchaussement du visiteur. Mme Le Pen aurait dû décliner l’offre plutôt que de se livrer à une démonstration de la démagogie dont elle est coutumière en France.

La cohérence idéologique du Hezbollah

Gilbert Collard: «Israël, le dernier rempart de la civilisation judéo-chrétienne».

Une semaine après son retour en France, Gilbert Collard, membre de la délégation du FN en visite au Liban, donnera libre cours à sa pensée profonde affirmant que «toute (sa) vie», il a «œuvré pour Israël, en raison de multiples amitiés». «Le dernier rempart de la civilisation judéo-chrétienne, c’est Israël», a lâché le député (Rassemblement Bleu Marine) du Gard lors d’un déjeuner avec une délégation de la «Confédération des Juifs de France et des Amis d’Israël (CJFAI)».

Une profession de foi qui sera appréciée à sa juste valeur par les Libanais qui ont constamment pâti des agressions répétées de ce présumé «dernier rempart de la civilisation judéo chrétienne». Et dire que les têtes brûlées miliciennes les phalangistes et leurs alliés se prenaient pour tel.

  • Le compte rendu de ce déjeuner sur ce lien : http://droites-extremes.blog.lemonde.fr/2017/02/08/quand-louis-aliot-et-gilbert-collard-se-desolidarisent-de-frederic-chatillon/

Paradoxalement, la seule formation ayant fait preuve de cohérence idéologique vis à vis du phénomène Le Pen aura été le Hezbollah qui a boycotté la totalité de la visite de la candidate à l’élection présidentielle française, contrairement aux chouchous de l’Occident, les milices chrétiennes libanaises, y compris Walid Joumblatt, chef druze du parti socialiste. Le camarade de François Hollande au sein de l’Internationale socialiste a délégué un de ses représentants au salon des ambassadeurs au parlement libanais pour saluer Marine Le Pen.

Le Hezbollah, à tout le moins sa branche militaire, est inscrite su la liste noire des organisations terroristes de l’Union Européenne. Il se garde néanmoins de toute confusion idéologique et ne pactise pas avec le Front National, alors que les milices chrétiennes, au lourd passé terroriste, pactisent avec le diable FN tout en continuant à bénéficier de la sympathie de la caste politico médiatique française. Le propre de la rationalité cartésienne française.

Le Liban n’a décidément pas porté chance à Marine Le Pen. Une semaine après son voyage, la candidate a été déboutée de sa plainte contre son rival de gauche Jean Luc Mélenchon, qui l’avait qualifié de «fasciste» et le parlement européen a levé son immunité parlementaire afin qu’elle réponde devant la justice de la diffusion d’images sur les horreurs de Daech, dans un appel démagogique aux bas instincts populistes.

Marine Le Pen au Liban c’est finalement une mauvaise manière à la démocratie, une mauvaise manière au Liban et à la France, et à l’amitié franco libanaise, pour la plus grande satisfaction des groupuscules proto fascistes des deux pays.

Interview de René Naba (La clé des ondes 90.10) sur la visite de Marine le Pen au Liban.